Avouons-le, nous avions quelques appréhensions avant d’aller voir le nouveau film d’Abel Ferrara, que l’on jugeait moins respectable depuis son méfait cinématographique basé sur l’affaire DSK. Mais le sujet, Pier Paolo Pasolini, nous inspirait trop pour que l’on passe à côté. Retraçant les dernières 24 heures de la vie du réalisateur italien, Pasolini est envoûtant. D’une créativité insatiable (il termine Salo, il écrit des lettres, imagine des scénarios à venir), engagé politiquement (il ne mâche pas ses mots quant au gouvernement italien de l’époque) et jouissant de ses mœurs sexuelles libérées, il va et vient dans la violence romaine de cet automne 1975. Il nous étonne, nous touche (notamment lors des scènes avec sa mère bien aimée), nous agace parfois, nous fait réfléchir. La photographie est à tomber, certains plans sont d’une beauté frappante, le fil narratif est tenu, et Willem Dafoe tient là l’un de ses plus beaux rôles. Sans tomber dans l’imitation forcée, il se contente d’interpréter, ce qui est déjà beaucoup, celui qui fut assassiné, sauvagement, sur une plage d’Ostie. À nous alors d’aimer à nouveau celui qui s’est dévoué, corps et âme, à consacrer l’idole déchue du cinéma italien. Bravo Ferrara !
Un texte de Sophie Rosemont – Posté le 8 Janvier 2015