Quelques jours après l’annonce du décès de son iconique fondateur Hugh Hefner, Playboy annonce que sa playmate de novembre 2017 sera, pour la première fois de son histoire, un mannequin transgenre. Une dizaine de pages du prochain numéro seront dédiées à la Française de 26 ans qui figure dans le numéro hiver 2017-2018 d’Antidote : Fantasy.
Si Hugh Hefner n’était pas décédé récemment à l’âge de 91 ans, Inès Rau aurait été la première transsexuelle en couverture du magazine Playboy, pour le numéro novembre-décembre 2017. Rendant hommage à son fondateur, il consacre aussi une dizaine de pages à sa nouvelle playmate, comprenant une interview, un shooting réalisé par Derek Kettela, et un poster. « Je suis très flattée, je ne m’y attendais pas du tout, raconte-t-elle, d’autant que je ne suis pas la fille la plus « juicy », je suis assez fine et athlétique. La proposition de Playboy était le plus beau compliment qu’on pouvait me faire.»
Sa position éditoriale progressiste était d’ailleurs soutenue par le fondateur du magazine à la retraite : « Les droits LGBT étaient le dernier cheval de bataille de Hugh Hefner, d’ailleurs il s’est beaucoup battu pour le mariage pour tous, rappelle-t-elle. Il était ravi que je sois choisie pour la cover ». Avec cette couverture, la mannequin signe le coup d’éclat le plus historique d’une vie déjà hors-norme.
Photo : Inès Rau dans le numéro novembre-décembre 2017 de Playboy
Sa deuxième collaboration avec Playboy
À quatorze ans, encore garçon, elle accompagne sa mère fêtarde aux Bains Douches, rencontre David Guetta et parvient à se faire engager comme danseuse. Elle part alors en tournée d’Ibiza à Miami, et se sentant femme depuis ses plus jeunes années, achète des hormones sur le marché noir à partir de ses seize ans. Le jour où elle obtient sa majorité, elle effectue sa transformation, soutenue par sa famille. « Pendant l’opération, j’ai rêvé que je traversais un océan qui n’en finissait pas, et que j’arrivais de l’autre côté, confie t-elle. Et c’est un peu ce que j’ai vécu, j’ai vraiment eu cette satisfaction, ce bonheur, un sentiment de liberté, d’accord avec moi-même, avec mon âme, avec mon coeur. Je me suis aimée, j’ai aimé mon corps plus que jamais, j’ai pu commencer à avoir une vraie sexualité, à être à l’aise avec mon corps. C’était fantastique. »
Repérée par une personnalité de la mode alors qu’elle travaille comme physio à l’entrée du club parisien Man-Ray, Inès Rau entame une carrière de mannequin sans dévoiler son identité trans, puis s’envole pour New York à 23 ans, et pose pour Vogue ou encore Balmain. En 2014, elle est contactée pour un premier projet avec Playboy. « Au début, je ne disais pas que j’étais transexuelle, mais la rumeur a fait le tour de New York parce que je l’avais tout de même révélé à mes amis proches, et c’est arrivé à l’oreille de personnes travaillant chez Playboy qui faisaient un numéro spécial en mai 2014, explique t-elle. Ils voulaient une photo avec une trans dans ce numéro, et m’ont dit que c’était avec moi qu’ils voulaient le faire si j’acceptais de faire mon coming out. Je prévoyais déjà de le faire, donc le timing était parfait. »
Inès Rau devenait ainsi la première trans à figurer dans Playboy, sans avoir pour autant avoir à l’époque le statut de « playmate du mois » du magazine. C’est maintenant chose faite avec le numéro à venir, à travers lequel elle offre une nouvelle visibilité aux trans, dans le sillage d’autres mannequins comme Lea T ou encore Andreja Pejić. Elle s’en réjouit mais doit encore faire face à certaines remarques transphobes : « Il va falloir que je sois forte, parce que certaines personnes sont vraiment méchantes dans leurs commentaires. Mais même si ça me fait mal de les lire, je suis vraiment contente de faire partie des pionnières qui participent à ouvrir les esprits.»