Yann Weber, directeur de la rédaction et de la création, raconte pourquoi il a décidé de photographier ce numéro d’Antidote hiver 2017-2018 et en quoi le fantasme est essentiel à tout renouveau. Voici Fantasy.
Ils ont été douze avant moi. C’est avec fierté, joie et une once d’appréhension que je vous présente le nouveau numéro d’Antidote dont je suis cette saison le photographe.
Il est dédié au fantasme. Le mien était de prendre l’appareil photo. Je le réalise ici. J’ai longuement réfléchi et hésité avant de me lancer. Par doute de ma capacité à réaliser autant d’images dans un temps si court, par crainte de voir ma démarche taxée de projet mégalomane et certainement par humilité face à ceux qui m’ont précédé. Je ne pouvais toutefois me défaire de cette devenue irrépressible envie de photographier moi-même cette quinzième stimulante édition du magazine.
Après Borders, l’envie politique de défier frontières et conventions, Fantasy incarne la vision d’un monde aux réalités multiples, évolutives et subjectives, un besoin de voir et de se voir à travers un prisme davantage personnel qu’imposé. Afin de mieux se comprendre et se respecter aussi. Si les désirs des uns ne font pas toujours le plaisir des autres, le fantasme demeure un moteur aussi puissant qu’inépuisable de changement, de renouveau et d’acceptation de soi ainsi que de ceux qui nous entourent.
Catherine Millet en a fait le guide de sa sexualité, Alexandre de Betak celui de sa créativité, Jorja Smith sa ligne de conduite, François Sagat son fonds de commerce, Manfred Thierry Mugler son quotidien. Chacun vit, nourrit, interprète, personnifie ou transforme ses fantasmes de mille façons, ni belles ni étranges mais sublimement authentiques. L’illustre et énigmatique Zahia, un jour objet du fantasme, le lendemain du scandale, défend ici le droit à disposer de son corps. La jeune comédienne et activiste Rowan Blanchard remet en question le regard normé que porte la société sur les genres, les couleurs et le rôle que chacun se doit de jouer dans le grand théâtre du monde, selon les mots d’Alexandre Chavouet qui livre pour Fantasy le récit intime de la quête d’un soi pur et spirituel. Dalí a dit : « Aucun désir n’est coupable. Il y a faute uniquement dans leur refoulement. » Cet Antidote, j’en ai rêvé et le voici.