Comment le chanteur californien a inventé le clip le plus torride du monde.
Ça pourrait être la parfaite définition en images de la notion d’érotisme. Cette vidéo réalisée par le photographe de mode Herb Ritts pour le plus brûlant des singles du troisième album de Chris Isaak, Heart-Shaped World (1989), met en scène un fantasme vieux comme le monde mais toujours aussi affriolant : l’amour à la plage. Filmé dans un noir et blanc léché, « Wicked Game » (« jeu pervers » en français) montre l’idylle sensuelle entre le jeune chanteur à la belle gueule racée mi dandy anglais-mi bad boy 50’s et la sublime top model des années 90, Helena Christensen. Il fronce les sourcils, lance des regards perdus vers le ciel, tombe le marcel blanc (le même que Brando), recoiffe sa banane gominée à la Elvis pendant qu’elle fait la moue en culotte blanche, les mains posées sur ses seins nus à peine cachés par sa chevelure ondulante. Le rockeur caresse, enlace, embrasse et murmure des mots à l’oreille de la mannequin magnétique et hot sur fond de vagues et de palmiers. L’alchimie est palpable, la lumière, photographique et veloutée, le cadrage filmique (le plan le plus intense restant celui du regard bleu océan d’Helena incrusté sur fond de nuages mouvants), atteignant une sorte de perfection dans l’illustration de l’intensité charnelle du morceau. Ce corps à corps aussi chaud que romantique, tendre et poétique ressemble à un court-métrage tourné par David Lynch, qui a réalisé le deuxième clip existant du morceau. Le cinéaste fera d’ailleurs tourner Isaak dans son onirique Twin Peaks : Fire Walk With Me (1992), tiré de la série. Et « The Wicked Game » ne rencontrera le succès (et les charts) qu’en 1991, quand Lynch l’inclura dans la bande originale de Sailor & Lula. Isaak, pas franchement reconnaissant dira du réalisateur, qu’il le suivait partout comme un chien dans les rues de Los Angeles.
L’anecdote : Le jour du tournage à Hawaï, il faisait si froid qu’Helena avait la chair de poule (ce qu’on voit à l’écran en y prêtant attention) et quand le chanteur la tenait dans ses bras, il voulait surtout la réchauffer.
L’histoire de la chanson : Le morceau a été composé par Chris Isaak qui venait de raccrocher au téléphone avec une femme dangereuse (avec laquelle il n’aurait pas du être mais qui l’attirait terriblement). Elle voulait absolument passer chez lui en pleine nuit et juste avant qu’elle arrive, il écrivit ce titre évoquant évidemment le “jeu pervers” -aujourd’hui on dirait « it’s complicated »- dans lequel elle le tenait. Extrait : « Le monde était en flammes / Personne d’autre que toi ne pouvait me sauver / C’est étrange ce que le désir / Arrivera à faire faire aux insensés / Je n’avais jamais rêvé que je rencontrerais quelqu’un comme toi / Je n’avais jamais rêvé que je connaîtrais quelqu’un comme toi / Non, je ne veux pas tomber amoureux / De toi / Quel jeu pervers / de jouer / A me mettre dans cet état / Quelle chose perverse / De me laisser rêver de toi. »
La version du clip réalisé par David Lynch en 2012 :