Qui est Aurora, la pop star norvégienne de 20 ans ?

Article publié le 13 septembre 2016

Texte : Edouard Risselet

Son prénom la prédestinait à son actuel statut de pop star dans sa Norvège natale. Aurora n’a que 20 ans, elle est autodidacte, s’est produite sur la scène de Rock en Seine fin août, poursuit une tournée internationale grâce à des tubes tels que Runaway, et bénéficie du soutien de Katy Perry. Nous l’avons rencontrée.

Si elle en a le nom, Aurora n’a ni l’ego ni les velléités d’une pop star. Elle vole de ville en ville, de Paris où elle s’est produite à Rock en Seine fin août à New York où elle jouera en décembre. Comme pourraient le faire ses aînés. Car cette jeune norvégienne a fêté ses 20 ans en juin dernier. Jamais poussée par ses parents mais par sa propre envie d’écrire et de chanter ses textes, Aurora Askens s’est plongée dans la musique depuis plus d’une décennie.

Si bien que lors du premier concert qu’elle donne dans son lycée à l’âge de 15 ans, la musique qu’elle délivre semble déjà bien mature. Il lui faudra attendre un an avant d’être repérée. Elle n’écume ni les castings ni les bureaux des producteurs, car son dessein n’est pas de devenir une star. Aurora enregistre pour ses parents un titre dont elle leur fait cadeau le jour de Noël. Un ami diffuse à son insu le morceau sur une plateforme de streaming. Quelques mois plus tard, elle signe chez un label norvégien.

Aujourd’hui représentée par Capitol Music en France, un label du groupe Universal, elle enchaîne les morceaux à succès tels que Awakenings, Runaway ou encore Running with the Wolves. Avant qu’elle ne se produise sur le plateau de l’émission C à Vous, nous avons rencontré Aurora à Paris. Elle raconte son processus créatif, évoque une certaine schizophrénie dans son écriture et ses goûts musicaux et explique pourquoi elle ferait la pire des célébrités.

Antidote : Vous avez joué à Rock en Seine fin août, racontez-nous.
Aurora : C’était incroyable. J’adore jouer en France parce que les spectateurs me donnent toujours beaucoup d’amour et d’énergie. C’était aussi la première fois que l’on faisait un festival français aussi tard. Et c’était génial parce que l’on jouait au crépuscule. On a commencé sous la lumière, puis le soleil s’est progressivement évaporé. On a fini dans l’obscurité totale et c’était génial d’assister à ce changement.

Cela a-t-il eu une influence sur votre performance?
Beaucoup oui. Nous sommes toujours plus timides à la lumière, et plus sauvages avec l’obscurité. Ça m’a donc aidé d’abord moi mais aussi les spectateurs. C’était magique. Je préfère jouer la nuit car tout le monde se sent moins exposé, et on se sent plus libre de chanter et danser, crier et faire ce que l’on veut.

Comment êtes-vous passée du lycée de votre ville natale à la scène d’un grand festival ?
C’est le fruit de beaucoup de travail. J’ai été signée par mon manager à Bergen en Norvège à l’âge de 16 ans, et depuis, j’ai beaucoup voyagé, j’ai enregistré des chansons et j’en ai publié. Puis j’ai commencé à me produire sur scène avec un groupe en février 2014 à Oslo. Les gens ont commencé à me connaître en Norvège grâce à ça, j’ai reçu beaucoup d’attention de la part des radios. C’est une belle chose que de se construire en tant qu’artiste sur scène.

Continuez-vous d’écrire des morceaux en tournée ?
J’écris tout le temps. J’écris à la maison aussi, c’est très calme, je peux regarder les montagnes et l’océan, j’écris très doucement, des morceaux doux, parfois tristes. En tournée, c’est bien plus agité, j’écris des sons plus rapides, plus turbulents.

Comment définiriez-vous votre musique ?
Je pense qu’à l’heure actuelle, c’est plutôt de l’alternative-pop, plutôt sombre, mais aussi éclairée, car certains sont tristes et d’autres sont heureux. Il y a quelque chose d’un peu schizophrénique, si on peut appeler ça un genre. Schizo-pop ? [Rires] Je pense que cela va changer, parce que moi je vais changer aussi. Je ne sais pas vraiment comment, mais je commence à me lasser et je veux essayer quelque chose de nouveau.

J’ai lu que vous étiez inspirée par Leonard Cohen et Bob Dylan, mais est-ce que d’autres artistes contemporains vous inspirent ?
Il y a cette artiste Enya, elle chante comme un ange, elle est irlandaise. Son univers est magique, j’aime la façon dont elle utilise la voix dans ses morceaux. J’adore le heavy metal aussi, notamment un groupe français qui s’appelle Gojira, ils sont incroyables. Leur album Enfant Sauvage est génial. Je veux essayer de faire de ma musique un mélange entre quelque chose de très extrême et quelque chose de très apaisé, entre le heavy metal et les anges.

Katy Perry vous a soutenue sur Twitter, que pensez-vous de sa musique ?
Je comprends que les gens l’apprécient. J’aime le fait qu’elle puisse écrire de façon commerciale mais en gardant ce truc personnel. Firework est un beau message par exemple. Je pense qu’elle a beaucoup aidé ses fans en leur offrant une chanson pareille. Mais je n’écoute pas tellement ce genre de musique, j’écoute de la musique calme, classique souvent. Je ne sais même pas si j’écouterais mes chansons si j’étais quelqu’un d’autre.

Sur la couverture de votre album, vous avez des ailes de papillon mais votre corps est encore enfermé dans le cocon. Est-ce une métaphore de votre carrière d’artiste ?
Oui, exactement. Certains des textes ont été écrits quand j’avais 16 ans, d’autres quand j’avais 11 ans. Ce qui est bizarre à propos de ce premier album, c’est qu’il ne représente pas seulement l’Aurora d’aujourd’hui mais aussi Aurora quand elle avait 9 ans, et c’était déjà il y a 10 ans. J’ai ce sentiment que même si vous pouvez voler, grâce à vos ailes, vous pouvez tout faire et vous pensez savoir exactement ce dont vous avez envie mais le jour d’après, vous voulez tout autre chose.
Enfin, en ce qui me concerne, je change d’avis sans cesse. Quand vous êtes un papillon, vous avez toujours plus à accomplir, et vous pouvez évoluer, vous améliorer, et apprendre à mieux vous connaître. Je suis persuadée que la larve ne sait pas qu’elle va devenir un papillon. Quand on est encore dans le ventre, on n’a pas non plus conscience de ce que l’on va être. Et c’est ma philosophie. On ne sait pas ce qui peut arriver, et c’est incroyable de pouvoir se dire qu’il y a quelque chose ensuite. On ne peut pas juger de son potentiel avant d’avoir tout essayé.

Est-ce pour cela que vous avez voulu essayer les cheveux gris ?
Je les ai depuis très longtemps. J’ai commencé à le faire à 14 ans, j’aimais juste l’idée qu’il n’y ait pas de distraction sur mon visage. Mes cheveux sont très blonds, mais je ne pouvais pas attendre de les voir devenir gris par eux-mêmes. Je décolore aussi mes sourcils pour qu’ils n’attirent pas trop l’attention.

Essayez-vous de construire un personnage pour vous protéger de la célébrité ?
Je médite beaucoup et je fais beaucoup de yoga. Et je pense que je dois être protégée car je ne pense pas qu’aucun humain soit fait pour être célèbre, ce n’est pas quelque chose de naturel. Et vous avez vu aussi bien que moi combien de gens ont été détruits par la célébrité. Car c’est trop difficile à assumer tout seul. Mais je pense que quelqu’un quelque part veille sur moi.

Et n’avez-vous justement pas peur que cela vous détruise ?
Si, et c’est quelque chose de très étrange. Quand je suis à la maison en train d’écrire ou dans mon lit, je n’ai pas vraiment conscience que des gens sont en train d’écouter ma musique, je ne peux pas vraiment m’en rendre compte. Je pense que je ne réalise pas encore à quel point tout ça est allé vite et les proportions que ça a pris. Et je ne pense pas que je ferais une bonne célébrité. Je n’aime pas les tapis rouges, ça n’est pas naturel et je ne suis pas à l’aise. Mais je pense que si vous voulez être musicien, ça fait partie intégrante de votre métier. Mais je n’ai pas vraiment choisi, je veux juste écrire de la musique et je déteste devoir être un personnage public en parallèle. Mais c’est comme ça. Je pense que je ferais la pire star du monde.

Comment avez-vous envie de grandir, à la fois en tant que personne et en tant qu’artiste ?
Je pense que je veux grandir en ayant conscience que je ne suis supérieure à personne d’autre. Qu’importe mon succès ou mes accomplissements, je reste moi-même et ma musique est plus essentielle que moi. Je veux juste donner le meilleur d’Aurora.

Le dernier album d’Aurora All My Demons Greeting Me As A Friend est disponible sur Itunes et Spotify.

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