La Maison Européenne de la Photographie (MEP) met à l’honneur le photographe chinois Ren Hang, qui avait réalisé tous les shootings du numéro Antidote : Freedom, en parallèle d’une deuxième exposition dédiée à la jeune artiste prodige Coco Capitán.
La MEP vient d’ouvrir l’exposition « Love, Ren Hang », présentant l’œuvre du photographe chinois essentiellement composée de nus et de portraits, qui se tiendra jusqu’au 26 mai prochain. L’artiste, décédé prématurément en 2017 et considéré comme l’un des plus influents de sa génération, y est mis à l’honneur à travers une sélection de 150 photographies, dont certaines avaient été prises pour le numéro hiver 2016-2017 d’Antidote : Freedom.
Seul ou accompagné, debout, à l’endroit ou à l’envers, le corps est l’un de ses principaux sujets. Objet de jeu et de fascination, Ren Hang le met en scène dans toutes les positions, parfois vêtu, souvent déshabillé. Qualifiée de pornographique par les autorités chinoises qui l’ont censuré à maintes reprises, son œuvre constitue avant tout une ode à la liberté. Avec son travail, le photographe s’inscrit en effet dans la lignée du « réalisme cynique », un mouvement artistique chinois issu des manifestations qui secouent la place Tian’anmen de Pékin en 1989 quand il n’a que deux ans. L’exposition est également complétée par les bouleversants écrits dans lesquels Ren Hang se livre sur la dépression dont il souffrait, l’ayant acculé au suicide. Comme ses photographies, ils sont remplis d’une poésie viscérale.

Photo : Ren Hang.
Coco Capitán : de la mode au musée
L’œuvre de Coco Capitán allie elle aussi le texte à l’image, comme le révèle l’exposition que lui dédie la MEP en parallèle – la première qui lui soit consacrée par un musée, alors qu’elle n’a que 26 ans. L’artiste pluridisciplinaire (photographie, peinture, écriture, performance…) originaire de Séville, en Espagne, y présente ses clichés ainsi que ses plus célèbres aphorismes, qu’elle distille régulièrement sur son compte Instagram.
C’est d’ailleurs grâce à lui qu’Alessandro Michele, le directeur artistique de Gucci, l’avait repérée, avant de lui confier la réalisation du lookbook homme printemps-été 2015 de la maison italienne. Il lui a ensuite demandé de sérigraphier des T-shirts, qu’elle a recouvert de sa prose : « I want to go back to believing a story », « Common sense is not that common »… Plébiscitée par le monde de la mode (elle a également collaboré avec Maison Martin Margiela, Paco Rabanne, A.P.C. et de nombreuses publications), cette exposition marque une nouvelle étape pour Coco Capitán : le début d’une reconnaissance institutionnelle, l’imposant un peu plus comme l’une des artistes incontournables de la génération Y.

Photo : Coco Capitán.
Les expositions « Love, Ren Hang » et « Coco Capitán busy living everything with everyone, everywhere, all of the time » se tiennent du 6 mars au 26 mai 2019, à la Maison Européenne de la Photographie, 5/7 Rue de Fourcy, Paris 4.
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