Qui est Manuel Facchini, directeur artistique de Byblos ?

Article publié le 25 juillet 2017

Photo : Byblos automne-hiver 2017-2018
Interview : Alice Pfeiffer

Le directeur de la maison italienne Byblos, également à la tête de son label éponyme, construit des nouveaux canons de féminité en remixant histoire, underground et confection high-tech.

Des pans d’organza ornés d’impressions trompe-l’oeil 3D se marient à une armature en cuir aux découpes d’une précision chirurgicale : tantôt punk, tantôt aristocrate en Angleterre victorienne, les femmes que dessine Manuel Facchini sont marquées par leur hybridité radicale.

À la tête de la maison italienne Byblos depuis maintenant 10 ans, le styliste natif de Vérone dirige également son label éponyme depuis 2015. Pour le premier, il imagine des formes ergonomiques, des teintes vives et des silhouettes luxueusement athleisure ; pour le deuxième, il élabore un univers qui juxtapose notes gothiques et détails high-tech. Au centre, une volonté de réconcilier les contraires, d’injecter de la rébellion dans le plus simple des gestes créatifs.

Une pensée qu’il développe dans un apprentissage paneuropéen et des plus contemporains. Diplômé de la Central St Martins et passé par Fendi Jeans, le designer est un maitre de la ligne architecturale contrastée, des formes graphiques et structurées ultralégères. Pour les deux griffes, il déborde de références, de clins d’œil à des sous-cultures et des passions personnelles : le glamour hollywoodien, le retro-futurisme, les femmes-cyborg façon Blade Runner, les héroïnes glaciales des films de Hitchcock – une multitude de détails qu’il retravaille pour un résultat inédit – et qui exprime la complexité de chaque femme.

Byblos automne-hiver 2017-2018

Avez-vous un processus d’inspiration particulier lorsque vous commencez à croquer une collection ? Comment et où puisez-vous votre inspiration chaque saison ?
Cela se passe de façon assez naturelle, en écoutant mes attirances naturelles, tout ce qui me prend aux tripes. Puis, je fais souvent appel à une technique que l’on m’a enseignée lors des études à la Central St Martins. Cela (s’apparente à la méthode de « fleuve-conscience » employée par de nombreux écrivains, ndlr) consiste à se laisser guider instinctivement par une idée : on choisit un point de départ plus ou moins abstrait, une phrase, un son, une couleur, un détail sur une photo, puis on écoute et on note les sensations, les images, les associations qui nous viennent à l’esprit, sans retenue. À cela, doit se rattacher un travail de matérialisation de ces inspirations, une pratique, des idées d’innovations techniques, de confections, des formes concrètes. Aujourd’hui, le point de départ d’une silhouette peut être la démarche d’une femme dans la rue, un film, un rêve.

Votre approche est instinctive, donc, mais fait également référence à de nombreuses cultures et sous-cultures, n’est-ce pas ?
Oui, j’ai effectivement un profond intérêt pour l’art et l’architecture, et ce depuis toujours. Je suis fasciné par Zaha Hadid, qui était pour moi une véritable visionnaire, qui savait marier une vision futuriste à des demandes concrètes. J’aime aussi l’art contemporain, irrévérencieux, pop, à la perception personnelle et la portée universelle, comme Jeff Koons ou Damien Hirst par exemple. Et les prouesses techniques d’athlètes comme Usain Bolt me laissent sans voix !

Vous avez repris les rênes de la maison Byblos il y a maintenant 10 ans. Quel était votre but en accédant à ce poste ?
Je me souvenais de ce label découvert lors de ma jeune vie adulte pendant les années 1990, et notamment de leurs formes souples, leurs explosions de couleurs, leurs superpositions inattendues de matières.
J’ai voulu garder cette formule, tout en la mettant à jour, la lier à des inspirations underground, des détails de fabrication techniques, des références à l’art contemporain. Lier fraicheur, légèreté, énergie, et luxe à l’italienne : voici ma mission !

Manuel Facchini, directeur artistique de Byblos

Qu’avez-vous cherché à explorer dans votre ligne personnelle ?
Je m’autorise quelque chose de radicalement contrasté, une force extrêmement sensuelle, une nymphe robotique, une gothique sportive, de la rigidité et de la douceur, une carapace qui abrite une fragilité. Je contraste des matières vaporeuses, légères, transparentes à des structures marquées, du cuir, des ceintures, des harnais qui dessinent le squelette, et que je relève souvent de détails subtils comme des broderies graphiques.
Je m’inspire également beaucoup d’éléments naturels comme des nervures, des écailles, des teintes célestes ou que l’on peut apercevoir en mers profondes. Cela apporte une élégance essentielle, sans âge. J’admire également le travail de Peter Gentenaar aux créations fleuries mais minimalistes, anguleuses : c’est ce genre d’équilibre que j’essaye de retranscrire dans mes silhouettes éponymes. Touts ces mondes n’ont rien en commun et j’y trouve une dissonance harmonieuse, entre passé et futur, nature et technologie, pour un présent toujours novateur.

Quel est le fil conducteur entre votre travail pour Byblos et votre marque personnelle?
Ce sont deux univers bien distincts, pourtant on trouve certains points communs dans la philosophie plus générale des deux marques, et du respect, voire de l’hommage porté aux femmes : une sensualité, des formes qui ondulent, un passage du fluide au structuré, de l’organique au géométrique, un confort, une forme de liberté de mouvement et un sens de puissance et de contrôle, qu’elles soient intégralement couvertes, ou dans la plus minuscule des robes.

Comment définiriez vous l’élégance ?
Le beau, l’élégant – ce sont des notions impossibles à définir en quelques mots, ce ne sont pas des formules scientifiques, mais un ressenti inné, une émotion brute.
On peut voir la beauté dans un simple geste, un échange de regard, un pas de danse. C’est précisément cela qui m’inspire : un ressenti qui existe sous un million d’incarnations, que je me dois de réinventer chaque saison, afin de raconter une nouvelle histoire pour remettre à jour ces sensations.

La collection automne-hiver 2017-2018 de Byblos est disponible sur le site de vente en ligne et dans les points de vente de la marque.

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