C’était un pari. En 2010, le groupe LVMH lançait un site réalisé par une « équipe internationale de créatifs et de rédacteurs pointus », dont l’objectif quotidien était de délivrer une actualité, hyper éditorialisée, issue de la pop culture, du lifestyle et de la mode. Le tout sur un format de prédilection : la vidéo. En plein dans le mille ! Très vite, Nowness fait des émules, et, bien entendu, plaît beaucoup aux marques – qui, rassurons-nous, n’ont pas besoin de faire partie de l’écurie LVMH pour que leur contenu y soit dévoilé. Question d’indépendance et de légitimité. Seule condition : que le contenu soit chic, voire choc, toujours dans l’air du temps.
Les avant-premières sont alléchantes : des photographies d’Hedi Slimane (alors qu’il n’était pas encore arrivé chez Saint Laurent), un court-métrage bien senti sur Daphné Guinness, les derniers clips d’artistes en vogue (de Nas à Brigitte en passant par The Acid), des campagnes d’enseignes internationales… Le critère : qu’elles soient esthétisantes et dotées d’un VIP : on a récemment vu Kate Moss, Erin Wasson et Yohji Yamamoto œuvrer avec classe pour des publicités ou des collaborations ultra léchées. D’Alice Temperley à Hans Ulrich Obrist, les contributeurs sont tout aussi prestigieux que les sujets.
Plus fort encore, et très malin du point de vue marketing, un clip de shopping interactif comme celui réalisé par le collectif Tell No One, « Mine All Mine », qui permettait de choisir des pièces hyper désirables portées par des danseurs habités par leur art. Toujours à propos de danse, c’est sur Nowness qu’a récemment été publiée une sublime chorégraphie, mise en scène sur les toits de Paris, de Benjamin Millepied… Vendre du rêve, et plus encore : Nowness a compris la formule magique de ce que doit être, en 2015, le marketing d’un luxe en perpétuelle recherche de sens.

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