Comment Maison Ullens s’est fait un nom dans le monde fermé du luxe

Article publié le 30 novembre 2016

Photographe: Antoine Harinthe. Stylisme : Charlotte Toffin. Modèle : Laura Hagested @ Oui Management
Texte : Jessica Michault

Maison Ullens n’entend pas révolutionner la mode mais excelle dans l’art de composer un vestiaire élégant d’une qualité irréprochable destiné à une femme nomade. Sa charismatique fondatrice Myriam Ullens revient sur le succès du label, dévoile comment sa victoire contre la maladie a bouleversé sa vie et pourquoi l’attention portée au détail est le secret de toute réussite.

Myriam Ullens est une femme à l’allure enviable. Et voyager avec style est un exercice qu’elle maîtrise à la perfection. Depuis 2009, cette entrepreneuse belge accompagne les femmes du monde entier dans la composition d’une garde-robe chic et intemporelle conçue pour s’adapter à un mode de vie actif et mobile. Au cours des sept dernières années, sa prestigieuse maison de mode, Maison Ullens, s’est imposée tel le label signature de femmes de pouvoir à l’instar de Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international, du top model Irina Shayk et d’une série de rédactrices mode qui comptent sur la marque pour les aider à traverser le fashion month.

Jusqu’à maintenant, Maison Ullens a demeuré une griffe discrète. Entre autres parce que les femmes adeptes de ses pièces en maille et cuir de première qualité préfèrent garder ce secret mode pour elles et leurs amies les plus proches. Puis, le changement de nom de la société de MUS à Maison Ullens en 2013 a aussi contribué à la confidentialité du label. Mais tout cela s’apprête à changer.

Quand le mythique Ritz a rouvert ses portes en juillet dernier, une boutique Maison Ullens a fièrement trouvé place le long de la célèbre galerie de l’hôtel. Seules six maisons de luxe se sont vues accorder le privilège d’inaugurer un flagship store au sein des murs du Palace, un indice significatif du calibre des produits Maison Ullens.

Lors d’un entretien en tête-à-tête, Mme Ullens s’est livrée sur la fierté qu’elle tire de la création d’une maison de luxe moderne reconnue pour son engagement qualité, le potentiel qu’elle voit en le marché américain et a levé le voile sur son secret pour un mariage heureux.

Gauche : Chemise en crêpe de soi blanche ; Robe longue en crêpe de soie blanche, Maison Ullens. Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma.
Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez. Sandales à strass, Guiseppe Zannotti.

Droite : Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille « Bold », Saskia Biez.

Chemise en crêpe de soi blanche ; Robe longue en crêpe de soie blanche, Maison Ullens. Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma.
Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez. Sandales à strass, Guiseppe Zannotti.

Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille « Bold », Saskia Biez.

Antidote : Vous jouissez donéravant d’une boutique au Ritz et le monde de la mode s’enthousiasme pour votre marque, ressentez-vous un nouveau dynamisme au sein de la maison ?
Myriam Ullens : Je pense que nous avons toujours eu cette énergie et ce désir de faire découvrir Maison Ullens. Aujourd’hui, nous sommes justes plus structurés. Nous avons une idée plus claire de la direction que nous souhaitons prendre. Nous savons aussi mieux qui sont les adeptes de la maison. Mon attention s’est toujours portée sur la marque, mais nous savons désormais aujourd’hui où nous voulons l’amener. L’hôtel dispose d’une clientèle internationale, et je voulais que les gens apprennent à connaître la maison de façon progressive et organique. Au Ritz, une femme chinoise, une femme coréenne ou une femme américaine vont déambuler à travers la galerie et seront naturellement attirées à l’intérieur de la boutique, et c’est là qu’elles découvriront la beauté de Maison Ullens. C’est une boutique vraiment attrayante, elles n’achèteront peut-être rien sur le coup mais le nom de Maison Ullens leur restera à l’esprit.

Vous construisez donc une clientèle internationale. Existe-t-il un pays sur lequel vous vous concentrez en particulier ?
D’après moi, la direction que nous prenons est tournée vers les Etats-Unis. Notre magasin à Aspen se porte très bien. En fait, c’est drôle car Christine Lagarde tenait une conférence hier à Aspen et elle portait Maison Ullens. Certaines de mes clientes m’ont envoyé des messages pour me dire : « elle a la même veste que moi », c’est génial, et nous en sommes très fiers. Les salons que nous organisons aux Etats-Unis sont toujours des succès retentissants. Je pense que nous sommes vraiment prêts à prendre une place majeure sur le marché américain.

Qui est donc la femme Maison Ullens ?
Honnêtement, c’est toutes les femmes. Maison Ullens s’adresse aux femmes qui veulent vivre libres. Qui veulent être élégantes en toute circonstance, bien habillées sans pour autant renoncer au confort d’être à l’aise dans leurs vêtements.

Gauche : Top en cuir perforé doré, Maison Ullens.

Droite : Chemise en cuir perforé et pantalon en cuir nappa nacre, Maison Ullens.
Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

Top en cuir perforé doré, Maison Ullens.

Chemise en cuir perforé et pantalon en cuir nappa nacre, Maison Ullens.
Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

L’an passé, vous avez nommé Kim Laursen au poste de directeur artistique de la marque en remplacement de la créatrice Véronique Leroy, parlez-nous de cette transition.
Je pense qu’il est désormais possible de mixer différentes pièces plus facilement. C’est très important. Par le passé, une cliente qui venait chez nous pouvait repartir avec seulement un pantalon. Aujourd’hui, nous lui proposons une veste ou un pull qui se marie sans effort avec ce pantalon. Et elle quitte la boutique avec trois pièces dans son sac au lieu d’une seule.

Tout le monde s’accorde à dire que votre marque s’est forgée une réputation sur l’intemporalité de ces créations.
Il y a en effet quelque chose d’intemporel avec nos vêtements. Ce que j’affectionne particulièrement, c’est que peu importe votre âge, que vous ayez seize ou soixante ans, vous pouvez vous habiller chez Maison Ullens. Certaines de mes clientes me racontent que leurs filles passent leur temps à leur piquer les pièces Maison Ullens. Et c’est là que vous pouvez constater le succès de Maison Ullens et réaliser tout son potentiel. Si la jeune génération veut porter nos créations, cela indique que nous sommes en train de créer une communauté forte.

Mais toute cette société n’a-t-elle pas commencé par un défi ? L’histoire veut que votre mari vous a un jour fait un commentaire désobligeant sur les vêtements que vous portiez à bord d’un avion et que cela vous a donné l’idée de lancer votre propre label…
À quelques détails près. J’avais déjà bien réfléchi au lancement d’une marque destinée aux femmes qui voyagent beaucoup. Sa remarque m’a juste convaincue de le faire. Mais créer une collection concentrée uniquement sur le voyage est très compliqué dans la mesure où elle va naturellement s’étendre. Je pense que la seule chose que nous ne fassions pas aujourd’hui, ce sont les pyjamas et les robes du soir.

Combishort en cuir nappa navy et chemise en popeline blanche, Maison Ullens.

Combishort en cuir nappa navy et chemise en popeline blanche, Maison Ullens.

Qu’est-ce qui différencie vraiment, d’après vous, votre marque des autres ?
À vrai dire, une veste Maison Ullens n’est pas nécessairement ultra avant-gardiste. Elle est stylée, mais c’est une veste qu’une femme peut porter aujourd’hui et qu’elle pourra toujours porter dans trois ou dix ans. Elle ne sera pas démodée. La qualité des vêtements doit aussi être optimale. Sinon, se lancer dans un tel projet n’aurait aucun sens. Si je vous prépare un plat de spaghetti bolognaise ou une tarte au citron, je veux que ce soit les meilleures pâtes ou la meilleure tarte que vous n’ayez jamais goûtés. J’aime quand les choses sont bien faites. Autrement, ça ne m’intéresse pas.

Je crois savoir qu’un pourcentage des ventes de Maison Ullens est redistribué à une association que vous avez créée pour aider les gens à combattre le cancer ?
C’est un point essentiel pour moi. Je pense que partager et reverser est très important. Je crois aussi que cela donne une raison supplémentaire aux équipes de travailler pour nous. À Bruxelles, les bureaux de la fondation sont situés à côté du studio Maison Ullens afin qu’ils puissent échanger. Il faut que les gens prennent conscience du fait que le cancer est une maladie qui peut concerner tout le monde, à tout moment.

C’est une initiative très personnelle, puisque vous vous êtes vous-même battu contre le cancer. En quoi cela vous a-t-il changé ?
Ma vision du monde a été totalement bouleversée. Avant de tomber malade, je disais oui à tout le monde. J’ai appris à me mettre des barrières. Aujourd’hui, je suis capable de dire non. Je protège mon « jardin secret », ce qui m’est le plus précieux, c’est à dire ma famille, mon mari, mes enfants et petits-enfants.

En faisant mes recherches, j’ai aussi lu que votre rencontre avec votre mari il y a plus de vingt ans fut un vrai coup de foudre. Cet amour est-il toujours aussi fort ?
Plus fort que jamais. Nous pourrions faire face à n’importe quel aléa de la vie ensemble. Pour tout vous dire, nous avons déjà traversé plusieurs orages. Le secret, c’est de toujours porter de l’attention à l’autre. Ce sont les petites attentions qui comptent : lui préparer un plat qu’il aime, lui offrir un livre qui va l’intéresser, l’inviter au cinéma, aller dîner en tête-à-tête. L’amour est comme une plante, vous devez l’arroser un peu chaque jour pour qu’il puisse grandir et fleurir. Le dialogue doit être ouvert. N’attendez pas que la situation dégénère pour vous parler.

Avant même le lancement de Maison Ullens, vous étiez déjà une femme d’affaires émérite dans d’autres domaines, à l’instar de l’industrie alimentaire.
Je pense qu’il est essentiel d’avoir un brin de folie pour entreprendre. Débuter quelque chose à partir de rien peut être extrêmement stimulant mais cela demande aussi de nombreux sacrifices. La création d’une entreprise requiert beaucoup de force et de caractère, et il ne faut pas avoir peur d’affronter des moments difficiles.

Gauche : Tshirt en maille blanche et pantalon «Plain Knit», Maison Ullens.
Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

Droite : Pull «striped knit» et pantalon «wool stretch», Maison Ullens.

Tshirt en maille blanche et pantalon «Plain Knit», Maison Ullens.
Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

Pull «striped knit» et pantalon «wool stretch», Maison Ullens.

Où voyez-vous Maison Ullens dans cinq ans ?
J’espère être bien implantée aux Etats-Unis ainsi qu’au Japon. Mon objectif est de créer une communauté de femmes avides et fières de porter Maison Ullens. Qu’elles se sentent bien dans leurs vêtements. J’aimerais tellement que les gens arrêtent d’acheter une pièce simplement pour le nom du créateur inscrit sur l’étiquette. J’achète un vêtement parce qu’il est beau, bien fait, parce qu’il me va bien, parce qu’une attention est portée aux détails, parce que j’ai le coup de foudre. Je ne vais jamais acheter une pièce pour sa marque. Ce n’est pas le vêtement qui caractérise une femme, et c’est quelque chose que les femmes américaines comprennent tout particulièrement.

Que doit-on savoir d’autre à propos de vous ?
Je publie un roman en février sur Amazon, aux Etats-Unis. C’est l’histoire d’une grand-mère qui raconte l’histoire de sa vie à ses petits-enfants. Elle commence en 1943, date de sa naissance à Londres, jusqu’au jour où elle parle à ses petits-enfants. Quand j’étais petite, mon grand-père me racontait toujours des histoires. Mais il me contait le début du récit puis me demandait d’imaginer la suite, ce qui m’a aidée à développer mon imagination. Et depuis ce temps, j’ai toujours aimé inventer des histoires.

Quel est le meilleur conseil que vous n’ayez jamais reçu ?
Gaston Lenôtre, le célèbre chef pâtissier français – de qui j’étais très proche – m’a dit un jour : « Myriam, ne transige jamais sur la qualité et ce, quoi que tu fasses. Le jour où tu céderas, ce sera un échec ». Cette phrase m’est toujours restée à l’esprit. Maintenant, peu importe ce que j’entreprends, je le fais toujours avec les meilleurs ingrédients.

Gauche : Manteau en cuir réversible nacre, Maison Ullens. Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma.

Droite : Cardigan «Plume Knit», Maison Ullens. Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

Cardigan «Plume Knit», Maison Ullens. Boucle d’oreille pendante 2 lignes burmalite, Burma. Boucles d’oreille «Bold», Saskia Diez.

Photographe: Antoine Harinthe
Stylisme : Charlotte Toffin
Modèle : Laura Hagested @ Oui Management
Coiffure : Pawel Solis @ Atomo
Maquillage : Tiziana Raimondo @ Atomo

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