Dix ans après la fin regrettée de Pimp My Ride, la mode formule un éloge majeur au tuning, à son appétit pour le tape-à-l’œil et son amour inconsidéré pour la flamme maximale. Fasten your seatbelt.
En juin dernier, le designer allemand Philipp Plein chevauchait sa moto cross pour saluer une foule venue assister à un spectacle digne d’un blockbuster hollywoodien. Au programme, un show de Monster Trucks lâchés sur le podium dans l’optique de pulvériser une rangée de voitures chromées et vouées à la casse. C’est bruyant, ouvertement beauf et clairement assumé, c’est Plein.
Sa mode boostée au protoxyde d’azote n’est pas qu’histoire de mégalomanie. Elle incarne et transcende une collusion globale entre les univers de l’habillement et de l’automobile. De Wanda Nylon à Vetements et de Prada à Louis Vuitton, les marques se trouvent plus d’affinités avec le racing qu’elles n’auraient osé l’envisager.
De gauche à droite : Acne Studios automne-hiver 2016-2017, Louis Vuitton automne-hiver 2016-2017, Emilio Pucci automne-hiver 2016-2017, Wanda Nylon automne-hiver 2016-2017
1 – LA COMBINAISON
Le top Arizona Muse signait un retour remarqué sur le podium automne-hiver 2016 d’Acne Studios. Elle arborait une combinaison large en cuir rouge Ferrari dont la paternité est depuis revendiquée par les syndicats de mécaniciens du Mans.
De New-York à Paris, la combinaison intégrale, tantôt brute tantôt sage, a aussi fait son entrée sur les podiums de Courrèges, Emilio Pucci, Wanda Nylon et Louis Vuitton. Peu commercialisable en l’état, elle devrait se retrouver en boutique dans des versions divisées et plus adaptées à la vie quotidienne.
De gauche à droite : Paco Rabanne automne-hiver 2016-2017, boots à flammes Vetements et sweat Thrasher
2 – LES FLAMMES
Sur les flancs luisants de sa Citroën Xantia – Lamborghini du genre -, le passionné de tuning a trimé d’interminables heures pour réaliser à l’aide d’un pochoir la flamme parfaite. Il s’en targuera plus tard lors de réunions confidentielles où seul un cercle fermé d’initiés est autorisé.
Motif récurrent de la customisation automobile, la flamme a déjà inspiré par le passé les créateurs. Miuccia Prada imaginait pour son printemps-été 2012 des sandales enflammées qui défiaient déjà à l’époque la morale des ayatollahs du bon goût.
Chez Vetements, Demna Gvasalia dessine en 2015 une bottine à flammes – devenue emblématique du label – qu’il complète d’un body assorti. Julien Dossena brode, lui, de flammes les épaules et hanches des modèles de son défilé Paco Rabanne automne-hiver 2016.
De gauche à droite : Moschino printemps-été 2016, Andrea Crews automne-hiver 2015-2016, Wanda Nylon automne-hiver 2016-2017
3 – L’IMPRIMÉ AUTOMOBILE
Après la collection du label Andrea Crews en collaboration avec le constructeur allemand Opel à l’automne-hiver 2015, l’imprimé automobile a fait des émules. Le créateur Jonathan Anderson s’est plu au printemps-été 2016 à penser Loewe telle une marque automobile. Il en appose le logo à l’arrière d’une voiture de course, imprimée sur un maillot de la collection homme. Wanda Nylon, dans la mouvance de récupération de symboles iconiques initiée par Vetements et DHL, confond son nom avec celui du constructeur japonais Honda. Aucune marque n’a encore toutefois approché Dacia.
De gauche à droite : Vetements automne-hiver 2016-2017, Moschino printemps-été 2016, Prada printemps-été 2016
4- LES PANNEAUX DE SIGNALISATION
Depuis qu’il a repris les rennes de la maison Moschino, Jeremy Scott lui a fait renoncer de force à toute notion d’élégance à l’italienne. Après Barbie Moschino et la femme Maxi Best Of Moschino, le designer américain célèbre au printemps-été 2016 la femme Vinci Moschino. Non pas Mona Lisa, mais plutôt la réfléchissante femme Vinci Autoroute. Un plot orange planté sur le haut du crâne, un collier clé de 12 autour du cou et un tailleur gilet jaune, elle poursuit avec brio l’œuvre de sensibilisation de Karl Lagerfeld lancée en 2008 sur sa campagne de prévention routière.
De gauche à droite : Loewe printemps-été 2016, Carven automne-hiver 2016-2017, Louis Vuitton automne-hiver 2016-2017
5 – SPRAY PAINT
Les puristes de la discipline vous confirmeront qu’une peinture de carrosserie exécutée sans le moindre défaut justifie bien les deux cents mètres de marche qui séparent cette place de parking isolée de l’entrée d’Auchan.
Sur les podiums parisiens, l’obsession pour la customisation frappe de plein fouet la collection automne-hiver 2016-2017 de Louis Vuitton par Nicolas Ghesquière. L’un des blousons majeurs de la collection affiche les traces évidentes d’une peinture à la bombe. Chez Loewe, un pantalon au dégradé iridescent rappelle aussi les codes du tuning. Le duo de Carven fait, lui, l’éloge du graffiti sur carrosse avec des imprimés éclatants.
De gauche à droite : Rag & Bone automne-hiver 2016-2017, Vetements printemps-été 2016, Chloé automne-hiver 2016-2017
6 – LA MOTO
Si la mode a jusqu’ici considéré le motard en ensemble Furigan comme un être inférieur, elle fait son repentir et s’approprie même son look. Elle n’a toujours pas investi dans une moto Kawasaki vert fluo mais revêt volontiers un blouson de moto à l’épaule affirmée. Il est signé Chloé, Vetements, Rag & Bone, ou Juun.J. Chez A.F. Vandevorst, les mannequins castés pour le printemps-été 2016 défilent le visage couvert d’un casque de motard. Martin Margiela n’y avait pas pensé.