À l’occasion du lancement chez 3537 de la nouvelle Converse Sponge Crater, née de la collaboration entre le fondateur du label britannique A-Cold-Wall*, Samuel Ross, et la marque de chaussures américaine Converse, Antidote a rencontré le designer, en pleine Fashion Week masculine de Paris. À travers cet entretien, il revient sur son ambition pour le futur de Converse et de A-Cold-Wall*, évoque sa volonté d’être le plus sincère possible dans son travail quasi autobiographique et dépeint son désir d’allier approche utilitaire et esthétique conceptuelle.
Alors que la Fashion Week homme de Paris printemps-été 2023 bat son plein et que la chaleur estivale se fait de plus en plus pesante dehors, au fur et à mesure qu’approche la ligne d’arrivée du marathon des défilés, l’ambiance semble plus décontractée chez 3537, l’espace culturel et hybride de Dover Street Market, inauguré en septembre 2021, rue des Francs Bourgeois. Dans la fraîcheur de la cave en pierres voûtée, alors que les préparatifs de la soirée qui se tiendra ici le soir-même pour célébrer le lancement se poursuivent à l’étage, Samuel Ross nous reçoit détendu, profitant de l’attente entre chaque interview pour laisser filer ses doigts sur un piano installé dans un coin de la pièce. Habillé d’une chemise et d’un pantalon blanc maculés de tâches de peintures multicolores, il porte aux pieds la toute nouvelle Converse Sponge Crater. Elle se compose d’une carcasse spongieuse évoquant le sol lunaire, réalisée dans la mousse Crater de Nike qui intègre des déchets recyclés, à l’intérieur de laquelle est venue se glisser une chaussette en maille orange. Assis sur un pouf en fausse fourrure à même le sol, l’ancien bras droit de Virgil Abloh et ancien finaliste du LVMH Prize et de l’ANDAM revient au cours de l’entretien sur ce nouveau chapitre de son partenariat avec Converse, initié en septembre 2020 avec la Chuck Taylor All-Star Lugged et poursuivi depuis avec plusieurs modèles toujours plus radicaux, dont l’Aeon Active CX. Si cette dernière repoussait déjà les limites du design avec sa forme expérimentale et sa capacité à absorber les chocs, la Sponge Crater donne quant à elle l’impression – et la sensation – de marcher littéralement sur un nuage.
ANTIDOTE : Comme dans le design industriel et en tant qu’ancien designer produit, ton approche est très pragmatique. Après l’Aeon Active CX, qui repoussait déjà les limites du confort et de la technologie, quel était le problème que tu souhaitais résoudre avec cette nouvelle sneaker ?
SAMUEL ROSS : J’ai l’impression que plus je m’investis dans le footwear, plus mon esprit se libère et me permet de suivre mon instinct, d’expérimenter, plutôt que de chercher à apporter une solution à un problème. Je ne sais pas si c’est en lien avec la confiance entre moi et Converse qui s’est développée ou si c’est simplement parce que travailler avec un tel partenaire donne la possibilité d’imaginer toutes les formes possibles et imaginables et d’avoir accès à n’importe quel matériau.
La Sponge Crater semble être une sorte d’évolution de ta précédente sneaker imaginée pour Converse, la Aeon Active CX…
Le lien entre la Sponge Crater et l’Aeon Active, c’est cette volonté de repousser les limites de la forme, en plus du fait qu’elles sont toutes les deux fabriquées à partir de la mousse Crater de Nike, une technologie durable incroyable. Je suis tombé amoureux de ce matériau en 2019, lors d’un entretien avec John Hoke, le Chief Design Officer de Nike. C’est pour ça qu’il est omniprésent dans les Converse que je crée.
Photo : Converse Sponge Crater x A-Cold-Wall*.
La forme de ces chaussures sculpturales est assez futuriste. Mais tiennent-elles avant tout leur forme de leur fonction ? Et de manière plus générale, penses-tu que la fonction d’un objet doit dicter sa forme ?
Ça dépend de la catégorie. Pour le prêt-à-porter, oui. Les vêtements sont des produits de design dont la vocation est de rendre un service. Mais une œuvre d’art portable n’a aucune règle à suivre. Concernant la Sponge Crater, elle répond au besoin de confort, renforcé après le confinement. On y glisse son pied hyper facilement, comme dans une chaussette, grâce à sa tige en maille sans lacets, qui permet par ailleurs de réduire les chutes lors de la confection. On sait déjà ce qu’une chaussure doit apporter. Donc maintenant la question c’est plutôt de savoir à quoi doit ressembler la chaussure de demain ? Il s’agit avant tout de proposer de nouvelles idées.
Pourquoi cette asymétrie dans les trous sur la structure de la Sponge Crater ? Est-ce un clin d’œil à ton goût personnel pour l’asymétrie, visible sur nombre de tes créations A-Cold-Wall*, ou est-ce dicté par ton approche utilitaire ?
Les deux. C’est un geste esthétique qui sert aussi à améliorer la respirabilité. L’asymétrie, c’est presque une signature. Ici, c’est un trait d’union entre mon univers et celui de Converse, et également entre l’utilitaire et l’expérimentation.
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