La 080 Barcelona Fashion Week continue de s’imposer comme l’un des rendez-vous les plus intéressants de la scène mode européenne. Loin du rythme frénétique de Paris ou de Milan, Barcelone cultive un esprit d’indépendance et d’expérimentation, où les jeunes créateurs croisent des maisons établies dans une atmosphère à la fois solaire et conceptuelle. Cette édition, plus introspective que jamais, a mis en lumière des collections qui interrogent la vulnérabilité, la mémoire et l’évolution artistique.
REPARTO : la beauté du malaise.
Chez REPARTO, la peur devient matière. Le show ressemblait à une introspection mise en scène : silhouettes décomposées, tissus recyclés, détails romantiques et une fragilité sublimée. Inspirée par les vanités du XVIIe siècle, la collection transformait l’angoisse, le vide et la mort en quelque chose d’étrangement poétique. On y sentait cette tension entre le désir et la décadence, comme si chaque look oscillait entre la chute et la renaissance.
Moisés Nieto : l’élégance du retour à soi.
Pour célébrer ses quinze ans, le label Moisés Nieto signe une collection tout en équilibre, entre émotion et maîtrise. Les volumes sont précis, les couleurs (roses, rouges et tons neutres) se répondent dans une harmonie douce, presque méditative. On retrouve cette rigueur propre au label, adoucie par une sensualité chaleureuse et familière. Le show ressemblait à une lettre d’amour à son propre parcours : sincère, apaisé et profondément ancré dans le savoir-faire.
Doblas : l’art de la structure.
Chez Doblas, la structure devient langage. Le défilé oscillait entre rigueur et liberté, avec des silhouettes architecturées, des cols XXL à la Karl Lagerfeld et des volumes presque sculpturaux. Le noir dominait, ponctué de couleurs vives et d’imprimés fleuris qui adoucissaient l’ensemble. Même dans les pièces les plus fluides, on sentait une forme de contrôle, une main ferme derrière chaque coupe. Cette saison, Doblas affirme une identité forte, où la forme devient émotion et la rigueur, un acte de style.
Carlota Barrera : le souffle de la douceur.
Chez Carlota Barrera, la soie glissait comme une caresse. Transparences assumées, sangles au cou, mini-shorts et éclats d’orange au milieu d’un camaïeu de chair, noir et blanc… Les silhouettes dégageaient une nonchalance maîtrisée, presque sensuelle, non sans évoquer Ann Demeulemeester. Tout semblait pensé pour effleurer, pour révéler la peau sans la dévoiler complètement. Une élégance fluide, fragile et puissante à la fois.
Dominnico : le kitsch se rebelle.
Encore un show explosif, queer et théâtral pour la maison espagnole la plus portée par les célébritées. Imaginez Marie-Antoinette sur une moto, entourée de divas à perruques XXL, entre rose électrique et bleu pastel. Le créateur mêle opulence et excentricité avec une liberté totale : corsets, brillances et exagération joyeuse. Sexy, kitsch, mais toujours revendicatif, Dominnico célèbre l’excès comme une forme de pouvoir.
Acceptance Letter : la tendresse du souvenir
Dans des tons pastel et des imprimés, tout respirait la mémoire et la douceur chez Acceptance Letter. Les silhouettes réinventaient des pièces existantes comme pour transformer le souvenir en mouvement. Les cheveux tirés en queue basse renforçaient cette élégance calme, presque mélancolique. Une collection sur la guérison et l’amour, où chaque vêtement semblait murmurer : « Tu es encore ici, avec moi. »
Habey Club : l’instinct du cuir
Dans un silence de cuir et de gestes précis, Habey Club sculpte la matière comme une seconde peau. Les sacs deviennent des fragments d’architecture, les vêtements, des lignes taillées dans la retenue. Les ceintures s’enroulent comme des ponctuations autour de silhouettes brutes et sensuelles. La palette, ancrée dans les tons terre et bois, respire la nature et la maîtrise d’un luxe calme, presque animal.
Acromatyx : le chaos comme renaissance
Tout commence par un éclat : un bustier bleu électrique, presque incandescent. Le reste du défilé s’écrit en noir, en blanc, et dans les reflets de ce même bleu, comme un battement. Le chiffon froissé, les chemises déconstruites, les cuissardes hautes… tout semble né d’un chaos volontaire. Acromatyx explore la beauté du désordre, reconstruit la rigueur à partir de la rupture. Une étude du contraste, où chaque silhouette devient une expérience de renaissance.