La pop a trouvé en elle sa nouvelle aventurière. La géniale autodidacte Fishbach agite la scène musicale française depuis fin 2016 après la sortie de son premier EP. Huit mois et un album plus tard, elle s’apprête à conquérir le monde. Portrait.
Automne 2015, « jamais rien vu d’aussi mortel que ces tirs au hasard » – la chanson débarque sur les transistors streaming et la tout juste baptisée génération Bataclan s’approprie à la lettre l’entêtant refrain du désormais tube Mortel. Synthés électroniques, voix Rose Laurens, Moreno et Ringer à la fois, plume rugueuse, boite à rythme electro-pop façon eighties, silhouette gracile, visage porcelaine aux traits anguleux, âme rimbaldienne : Fishbach vient de naitre en accouchant à 25 ans de son premier EP solo.
On apprendra plus tard que le disque était sorti un 6 novembre, Paris l’a découvert le 14 du même mois, un matin traumatisé embué d’ombres et de fracas.
Un profil de jeune héritière sombre théâtrale et moderne se dessine en quatre titres chronos, une proposition musicale dense accompagnée de textes aiguisés, dramatiques ou plus légers.
« C’est assez fou le français, il y a tellement de possibilités syllabiques, des choses très gutturales et des choses très acides à la fois. C’est le mélange parfait entre une langue germanique et une langue latine. Tu peux jouer avec cet entre-deux. Gainsbourg a fait des merveilles sans jamais respecter l’accent tonique. »
La jeune autodidacte multiplie scènes et promos : Festival des Inrocks, Point Ephèmère et Printemps de Bourges. Une résidence musicale plus tard – et pas des moindre, les Transmusicales de Rennes, public et critiques assistent enthousiastes à l’éclosion d’un phénomène et intronisent en cœur leur nouvelle héroïne.
Janvier 2017, son premier album A ta merci débarque enfin et retourne la nouvelle scène française en un acte et douze titres élégants et magnétiques, mués en autant de personnages contés, d’histoires d’amour darks et de morts fantasques. Succès critique, Fishbach délivrera quelques clés de lecture de ses compositions aux plus curieux : sa jeunesse solitaire ardennaise, sa passion pour l’Histoire et son indifférence aux études, un oeil rivé sur GTA Vice City, l’autre à griffonner les textes de ses futurs titres repris aujourd’hui à la cantonade les soirs de concerts.
« Quand j’ai commencé à composer, je trouvais des nappes de synthés, des basses funky, des batteries avec une super production, des voix avec beaucoup de réverbe et de choeurs, des productions too much, comme moi : je suis too much. »
Comme son nom l’indique, Fishbach est un poisson : saumon étincelant remontant avec rage et à contre-courant le torrent de la pop. La tendance revival a désormais ses lettres de noblesse.
La mythique salle de la Cigale se remplit en un mois, provoquant dans la foulée l’annonce d’une deuxième date parisienne quelques semaines plus tard. Sur scène, douze titres, des impros maitrisées, la reprise tubesque de la babouche – du chanteur algérien Salim Halali – l’interprétation, clope au bec, d’une féroce et langoureuse boîte à papier, le tout accompagné de déhanchés désinvoltes rappelant les folles heures d’Elli Medeiros et de simagrées dignes d’une star de cinéma muet. La chanteuse et sa joyeuse bande tournent tout l’été en France et sont partis conquérir Londres, Berlin, Montréal et New York. Ils concluront la tournée par une date loin d’être anodine, un certain Bataclan, à l’automne prochain.
Remerciements à Fadhel Azouzi.

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